Certains éleveurs doivent faire face à des attaques d’ours ou de loups sur leurs troupeaux. Pour les protéger, le gouvernement a pris certaines mesures. Lesquelles ?
Eleveurs : les mesures d’effarouchement des ours
Jusqu’au 30 novembre 2021, à titre dérogatoire, les éleveurs pyrénéens peuvent perturber intentionnellement les ours bruns, sur autorisation préfectorale et toutes conditions par ailleurs remplies, pour protéger leurs troupeaux.
Il existe 2 types de mesures d’effarouchement :
- l’effarouchement simple, à l’aide de moyens sonores, olfactifs et lumineux
- l’effarouchement renforcé, à l’aide de tirs non létaux.
L’autorisation préfectorale est conditionnée à la mise en œuvre effective et proportionnée des moyens de protection du troupeau définis dans les plans de développement ruraux, ou à la mise en œuvre effective (attestée par la direction départementale des territoires et de la mer) de mesures reconnues équivalentes, sauf si le troupeau est reconnu comme ne pouvant pas être protégé.
Ces opérations ne peuvent être réalisées qu’en présence du troupeau et à sa proximité immédiate.
Cette réglementation ne s’applique pas aux mesures de conditionnement aversif qui peuvent être ordonnées par les préfets pour prévenir les dommages causés par un spécimen d’ours manifestant l’un des comportements suivants :
- absence persistante de fuite lors de rencontres avec l’homme
- attaques répétées d’un troupeau le jour malgré la présence du berger ;
- alimentation régulière à partir de nourriture d’origine humaine.
- L’effarouchement simple
Pour la mise en œuvre de l’effarouchement simple, il faut demander une autorisation préfectorale en vue de l’utilisation de moyens d’effarouchement olfactifs et des moyens sonores et lumineux suivants :
- moyens lumineux :
- ○ torches, phares ;
- ○ signaux lumineux de toute nature ;
- ○ guirlandes lumineuses ;
- moyens sonores :
- ○ effaroucheurs sonores de toute nature ;
- ○ cloches ;
- ○ sifflets ;
- ○ pétards ;
- ○ corne de brume ;
- ○ sirènes ;
- ○ avertisseurs ;
- ○ porte-voix ;
- ○ canon à gaz électronique ;
- ○ lance-fusée (crépitante ou détonante).
Cette demande précise l’identité des personnes chargées de la mise en œuvre de l’effarouchement. Elle doit être justifiée par la survenance d’au moins une attaque dans les 12 derniers mois ou d’au moins 4 attaques cumulées au cours des 2 années précédant la demande.
Notez que par « attaque », il faut comprendre « toute attaque pour laquelle la responsabilité de l’ours n’a pas pu être exclue et donnant lieu à au moins une victime indemnisable au titre de la prédation de l’ours ».
L’autorisation préfectorale est délivrée pour une durée maximale de 6 mois et peut être mise en œuvre à proximité du troupeau par le bénéficiaire, tant que le troupeau est dans des conditions où il est exposé à la prédation de l’ours brun. Le déclenchement des opérations d’effarouchement ne peut intervenir que lorsque des indices témoignant de la présence récente de l’ours brun à proximité du troupeau ont été relevés.
Pour recourir aux mesures d’effarouchement, il faut préalablement informer les agents de l’Office français de la biodiversité.
Chaque opération d’effarouchement doit faire l’objet d’un compte-rendu de réalisation détaillant les moyens mis en œuvre, le lieu, la date et les résultats. Ce compte-rendu est envoyé au préfet avant le 30 novembre ou lors de l’envoi d’une demande d’autorisation d’effarouchement renforcé.
- L’effarouchement renforcé
Pour la mise en œuvre de l’effarouchement renforcé, il faut demander une autorisation préfectorale, assortie du compte-rendu de réalisation des mesures d’effarouchement simple.
Cette autorisation permet de recourir à l’effarouchement par tirs non létaux à l’aide d’un fusil de calibre 12 chargé de cartouches à double détonation, ou, pour la protection des personnes, de cartouches à munitions en caoutchouc. Une demande d’effarouchement renforcé ne peut pas concerner le cœur du parc national des Pyrénées.
Cette demande peut être présentée :
- dès la 2e attaque intervenue dans un délai inférieur à 1 mois malgré la mise en œuvre effective de moyens d’effarouchement simple au cours de cette période ;
- ou, s’il y a eu au moins 4 attaques cumulées sur les 2 années précédentes, dès la 1ère attaque imputable à l’ours survenue malgré la mise en œuvre effective de moyens d’effarouchement simple
L’autorisation préfectorale est délivrée pour une durée maximale de 6 mois. Le préfet peut la suspendre si un compte-rendu ne lui est pas adressé tous les 2 mois ou si les conditions de sa délivrance ne sont plus réunies.
Les opérations d’effarouchement renforcé doivent respecter les conditions suivantes :
- les opérations sont mises en œuvre autour d’un troupeau regroupé pour la nuit, lorsqu’il est exposé à la prédation de l’ours et qu’un ours est repéré à sa proximité immédiate ; elles sont réalisées de nuit, avec une extension possible aux périodes crépusculaires ou matinales ;
- elles sont réalisées en binôme, une personne éclairant l’ours et validant la possibilité de tir et une autre manipulant l’arme ;
- elles sont mises en œuvre depuis un poste fixe ; si un seul binôme est présent, plusieurs postes peuvent être identifiés autour du troupeau, et le binôme peut changer de poste fixe durant la nuit ; en cas de présence de plusieurs binômes autour d’un troupeau, tout changement de poste fixe pendant l’opération est strictement interdit pour des raisons de sécurité ;
- les tirs de munitions à double détonation sont effectués en veillant à ce que celles-ci restent entre le troupeau ou le poste fixe et la zone estimée de présence de l’ours ; ils ne sont pas effectués en dessous d’un angle de 45° par rapport au sol ;
- les tirs de munitions à double détonation sont réalisés tant que le prédateur persiste dans un comportement intentionnel de prédation ;
- aucune munition létale du calibre des armes utilisées ne se trouve en possession des personnes réalisant l’opération au cours de celle-ci ;
- les tirs de munition à double détonation prennent en compte le risque incendie sur la végétation ou les constructions.
Les opérations d’effarouchement par tirs non létaux sont mises en œuvre par l’éleveur ou le berger, des lieutenants de louveterie, des chasseurs ou par des agents de l’Office français de la biodiversité. Les personnes effectuant ces tirs doivent être titulaires du permis de chasser valable pour l’année en cours.
Ces personnes doivent avoir suivi une formation préalable, composée de 2 modules obligatoires : un module théorique portant à la fois sur des aspects techniques et réglementaires et un module pratique consistant en la participation à au moins une opération d’effarouchement renforcé en présence d’agents de l’Office français de la biodiversité.
Les personnes qui ont suivi le module théorique dispensé en 2019 et n’ont participé à aucune opération d’effarouchement renforcé doivent suivre le module pratique avant la mise en œuvre d’une telle opération.
Chaque déclenchement d’opération d’effarouchement renforcé doit faire l’objet d’un compte-rendu détaillant le lieu, la date, le nombre d’ours observé, les moyens mis en œuvre (munitions, effectifs) et le comportement des ours. Celui-ci est établi par la ou les personnes ayant mis en œuvre l’opération d’effarouchement renforcé et transmis au bénéficiaire de l’autorisation, si celui-ci ne l’a pas mis en œuvre lui-même, en vue de son envoi au préfet. Dans le cas d’opérations mises en œuvre par des agents de l’Office français de la biodiversité, l’envoi du compte-rendu au préfet est effectué directement par ces derniers.
Eleveurs : les mesures de protection contre le loup
Pour protéger les troupeaux contre le loup, le gouvernement a mis en place une aide pour mettre à disposition des éleveurs des filets électrifiés permettant de constituer des parcs de regroupement nocturne.
Par ailleurs, la brigade mobile d’intervention grands prédateurs terrestres de l’Office français de la biodiversité peut se rendre sur place et former les louvetiers et chasseurs à la mise en œuvre des tirs de défense. Des autorisations de tirs de défense simples peuvent être délivrées par le préfet aux éleveurs concernés.
En outre, les départements concernés peuvent faire l’objet d’un classement par arrêté en cercle 1, 2 ou 3 (selon la proportion d’attaques de loups). Selon le classement, les aides sont plus ou moins élevées. Cet arrêté est révisé en fonction des nouveaux épisodes de prédation.
Pour les éleveurs qui conduisent leurs troupeaux en petits lots répartis dans de nombreuses parcelles, afin notamment de valoriser les intercultures, la mise en place de clôtures électriques renforcées peut s’avérer à la fois coûteuse et contraignante en entretien compte tenu de la présence fréquente de haies, ce qui limite le déploiement de moyens de protection des troupeaux contre la prédation.
Au vu de ce contexte, un troupeau ou une partie d’un troupeau pourra être reconnu(e) comme ne pouvant être protégé(e) par le préfet. Cela permet aux éleveurs concernés de bénéficier d’autorisations de tirs de défense ainsi que, pour ceux situés en cercle 1, d’indemnisations en cas de dommages répétés.
La mise en œuvre de cette mesure à caractère dérogatoire doit cependant rester exceptionnelle, l’orientation générale étant de privilégier la protection des troupeaux. Elle se fait au cas par cas, sur la base d’une analyse technico-économique et après avis du préfet coordonnateur du plan national d’actions sur le loup.